Un soldat presque exemplaire : chroniques de vie d’un héros abîmé.

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Chronique littéraire Un soldat presque exemplaire par Mally's Books - Mélissa Pontéry

Qui s’intéresse aux hommes qui ont fait la guerre ? Voici la question posée par Denis Brogniart dans ce premier roman coup de poing. Dans Un soldat presque exemplaire, l’auteur lève le voile sur les conséquences du stress post-traumatique, courantes au sortir de mission, mais trop longtemps passées sous silence.
Un récit poignant. Un bel hommage aux militaires.  

La quatrième de couverture…  

« L’armée, c’est toute mon existence, me l’enlever signifie me tuer à petit feu sans possibilités de remonter la pente. Je n’ai qu’elle, je me considère comme son fils unique. »

Pour son premier récit, Denis Brogniart a choisi de raconter une histoire vraie. Le parcours d’un homme, pas comme les autres, celui d’un militaire français revenu du Mali, du Kosovo, d’Afghanistan, celui d’un soldat victime d’un syndrome post-traumatique, celui d’un père qui aurait pu n’être qu’un héros.  

Homme et soldat : au cœur d’un conflit interne.  

Stanislas n’est pas un tendre. Enfant déjà, l’amour n’est pas un sentiment qu’il étale, qu’il fuit même, gêné de ne pas en donner assez, ou peut-être de ne pas en recevoir… Ce qu’il aime, lui c’est l’action. Les films de Sylvester Stallone, d’Arnold Schwarzenegger, bourrés de testostérones. À travers l’écran, il se nourrit déjà de l’adrénaline du combat. Alors c’est sûr, quand il sera grand, il sera militaire.

Les rêves d’enfant n’ont de limites que celles qu’on leur donne, et des limites, Stan lui n’en a pas. Tout juste majeur, il s’engage. Dix-huit mois plus tard, c’est le départ. Pour lui, ce premier conflit est la chance de sa vie. Sur le terrain, il se sent enfin vivant. Il sauve des gens. Il est utile.

Très vite, il s’illustre au champ d’honneur. Courage, bravoure, c’est un héros. Un chef de guerre, respecté pour son exemplarité au combat, admiré pour sa prestance et sa force.

À la ville, les premières permissions renforcent la légende. Il impressionne par ses récits, séduit par son physique. Les femmes s’enchaînent.

On pourrait reprocher à l’auteur d’amplifier le cliché militaire extrémiste, bagarreur et misogyne. Mais que ce passe-t-il sous le vernis martial ?

C’est là que le bât blesse, car derrière le treillis et les uniformes d’apparat se cache un homme d’ores et déjà en proie à un stress aigu. L’introverti se transforme en chef de file, au même rythme que l’irritabilité s’exacerbe. La nuit, Stanislas est hanté par les images, les sons, les odeurs qui lui font revivre sans cesse ses opérations extérieures. Le jour, l’hyper vigilance s’installe. Le bruit d’une porte qui claque, une image télévisée suffit à réveiller la peur enfouie et le sentiment d’un danger imminent. Toutes les réactions sont amplifiées, les émotions décuplées, la source d’une détresse indicible que seuls l’alcool et la douleur peuvent anesthésier.

Les symptômes du trouble de stress post-traumatique sont connus depuis des millénaires, mais il aura fallu plus d’un siècle aux médecins pour le considérer comme une maladie nécessitant un traitement spécifique.

À travers, Un soldat presque exemplaire, Denis Brogniart dresse le portrait d’un héros de la Nation qui perd peu à peu le contrôle de sa vie. L’alternance des points de vue entre l’auteur et le soldat permet une analyse fine de la blessure psychique. Chapitres pairs, l’auteur livre le témoignage poignant d’une décente aux enfers. Chapitres impairs, le soldat nous entraîne dans sa chute. L’écriture est parfois très crue, mais nécessaire, pour comprendre la complexité de ces hommes prêts à tout donner au nom de nos libertés.  
 

Pour résumer…  

Un parcours de vie décrit sans ménagement, mais dans une réalité qui est bien celle de l’armée. Les images de guerre sont percutantes, de celles qu’on pense ne plus exister, et pourtant la violence est omniprésente. Un soldat presque exemplaire est un livre marquant, qui révèle les dissonances bouleversantes entre l’homme et le soldat, et met en lumière un long chemin pour la reconnaissance du stress post-traumatique.

Une histoire vraie. Humaine, violente, mais également pleine d’amour.


Ma note…  

14/20  

352 p. Flammarion, 19,90 €

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